L'entraînement pour le chaos à venir

J'ai passé un certain temps dans l'armée et travaillé à différents endroits au cours de ma vie, plus ou moins exotiques. Une chose que j’ai universellement remarquée est que plus les groupes sont efficaces et de haut niveau (qu'il s'agisse de militaires ou d'unités d'intervention de la police), plus ils pratiquent en entraînement leurs scénarios et missions spécifiques.

Combien de survivalistes à travers le monde pratiquent réellement leurs plans d'urgence ? J'ai peur qu'il n'y en ait que trop peu. Si vous faîtes partie de ceux-là, alors vous pouvez légitimement penser que vous figurez parmi les mieux préparés. Pour tous les autres, cet article leur est dédié...



Les exercices pratiques menés par les forces d'élite (simulations, exercices, répétitions générales) vont de la préparation générale aux missions éventuelles, à la construction de maquettes de bâtiments et quartiers, en passant par toutes les informations disponibles pour rendre les choses aussi réalistes que possible. Je ne dis pas qu'il faudrait vous préparer pour les urgences à un tel niveau (c'est leur travail), mais il est certain que vous devriez faire des répétitions générales pour éliminer les vulnérabilités et les faiblesses de votre (vos) plan (s). Et plus ces répétitions seront réalistes, mieux ce sera.

Pratiquement toutes les parties de votre plan d’urgence (communication avec la famille, plan d’itinéraire, utilisation d’une radio amateur, gestion des urgences médicales, survie dans les bois, gestion d’une panne de courant à la maison, etc.), requièrent de vous une formation pratique ainsi que la mise en condition du plan actuel de manière à l'améliorer et le pratiquer à nouveau.

Le danger est que si vous ne menez pas le processus de manière semi-réaliste, vous ne serez pas en mesure de vous rendre compte que vous n'êtes pas prêt avant qu'il ne soit trop tard. Comme il est coutume de dire dans ce domaine : "Ne pratiquez pas avant d'avoir tout compris correctement. Exercez-vous jusqu'à ce que vous ne puissiez plus vous tromper."

Découvrir ses capacités et faiblesses

L'une des plus grandes erreurs commises par les survivalistes ou d’autres personnes qui essaient de se préparer à des situations d’urgence ou de survie (même si elles ne veulent pas se classer parmi les survivalistes) est liée à ce qu’ils mettent dans leur sac d'évacuation. La plus grosse parmi les grosses erreurs est qu’ils emportent BEAUCOUP trop (histoire de l'avoir au cas où...). Puis, lorsqu'ils essaient de tout transporter, ils découvrent alors qu’il n’y aurait aucun moyen d'utiliser leur sac dans un véritable scénario d’urgence.

Un scénario réel de post-apocalypse pourrait vous obliger à marcher plusieurs kilomètres avec votre sac sur divers terrains (en admettant que vous preniez la peine de le mettre sur le dos et de marcher avec). C'est pourquoi, une fois que vous pensez avoir conçu le BOB "parfait", mettez-le sur vos épaules et partez l'essayer dans les zones où vous l'utiliseriez le plus probablement, ainsi que dans des zones (et scénarios) qui seraient plus difficiles.

Vous pourriez être surpris. Je portais des poids lourds depuis un bon bout de temps dans l'armée, et j'étais assez habitué. Puis, lors d'un exercice à l'extérieur, nous avons passé quelques jours à marcher sur un terrain recouverts de gros rochers de rivière arrondis, de la taille du poing. J'ai fini par ne plus pouvoir avancer du tout, à cause de la douleur causée par la pression exercée sous le centre de mon pied. Mon dos, mes jambes et mes poumons étaient prêts, mais mes pieds ne l’étaient pas.

Découvrir les problèmes avec ses équipements

En ce qui me concerne, j’ai mis un certain temps pour comprendre - et choisir - ce que j'allais mettre dans mon sac, car chaque fois que je pensais avoir pris les bons équipements, je les emportais dans les bois et les essayais ; pour découvrir alors que certains ne fonctionnaient pas, ou pas aussi bien que je l'avais pensé.

Certaines choses ne marchaient pas du tout comme annoncé, par exemple ces couvertures d'urgence faites d'une feuille d'aluminium qui passent pour un classique de la survie, alors qu'elles sont juste inutilisables, pour diverses raisons (je suis depuis passé à celles-ci). D'autres semblaient être une bonne idée, telles que placer des anneaux aux extrémités d'une scie de survie - celles constituées d'un seul fil d'acier. Non seulement les anneaux font très mal aux doigts, mais ils s'arrachent au bout d'un moment. Une solution consiste peut-être à utiliser des poignées en dur, voire en cuir. Depuis, je suis passé à cette scie Sven ; elle est plus grande, beaucoup plus chère, mais fonctionne vraiment !.

Ce ne sont que deux exemples parmi les articles plus courants privilégiés par les survivalistes. Seule la pratique pourra dire si ceux que vous avez choisis correspondent à vos attentes et à l'usage pour lequel vous les destinez.

L'étude ne crée pas la perfection ; seule la pratique parfaite rend parfait

Vous pourriez lire à longueur de journée à propos du fonctionnement d’une arme, sur la façon de tirer comme un pro du GIGN, ou même des livres spécifiques traitant d'une compétence en particulier, telle que la reconnaissance d'un bâtiment lorsqu'on est seul (un sujet crucial qui fera très bientôt l'objet d'un dossier spécial). Mais le fait est que tant que vous ne sortirez pas pour aller au stand et tirer avec, vous ne serez pas vraiment prêt.

J’utilise cet exemple parce qu’il est facile de comprendre ce que je veux dire au sujet de la façon dont le réalisme de la préparation peut affecter votre capacité à exécuter l'action le moment venu. Il est toujours mieux de lire des livres écrits par de véritables professionnels plutôt qu'essayer de deviner les choses par soi-même, mais aller au stand de tir est encore mieux que la lecture de livres.

Des exercices de tir pratiques avec des cibles mobiles qui vous tirent dessus (plus ils font mal, mieux ce sera !) sont beaucoup plus efficaces pour vous montrer où sont vos lacunes. A ce titre, les pistolets de paintball qui tirent des balles en caoutchouc sont bien mieux que ceux qui n'envoient que des billes de peinture (qui en plus pourrissent les équipements). Une fois que vous aurez pris une balle ou deux au-travers de la figure, vous serez beaucoup plus enclin à faire attention à ce que vous faites...

Lorsque vous aurez compris cela, mettez-le en application dans vos différents scénarios d'urgence. Si par exemple vous vous préparez à défendre votre maison en cas d’intrusion, pratiquez votre plan en agissant comme vous l'avez prévu si l'on pénétrait chez vous à partir de différents points d’entrée, en étant vous-même à divers endroits de la maison au moment de l'effraction. Vous constaterez peut-être que, dans l'un de vos scénarios, s'ils entrent par un côté et que vous vous trouvez dans le salon ou la cuisine, vous risquez d'être loin de l'arme que vous pensiez utiliser, ce qui vous obligerait à passer au plan B. Avez-vous un plan B ? Vous aurez peut-être besoin d'une arme secondaire qui vous permettra de gagner du temps (une seconde arme à feu, un couteau de cuisine, ou même un sabre de samouraï ornemental !). Ne riez pas, ce serait toujours mieux que de saisir un lampadaire du salon. Ou travaillez un autre plan.

Suggestions à propos des simulations

Pour vous préparer aux situations d’urgence, la meilleure façon de faire est d’examiner la situation qui pourrait se produire et ce que vous avez prévu de faire, puis de trouver le moyen de reproduire cette situation le plus fidèlement possible. Voici quelques exemples :

Coupure de courant prolongée - La plupart des gens prévoient une coupure de courant de quelques heures seulement. Ils ne font donc qu'acheter des lampes de poche et des bougies. Dans le cas de tremblements de terre, d'ouragans, d'inondations, ou peut-être même d'une Impulsion Électromagnétique ou autre événement du genre, la distribution du courant peut s'arrêter pendant beaucoup plus longtemps. Savez-vous dans quelle mesure et comment cela vous affecterait vraiment ? Essayez de couper l’alimentation de votre maison durant des périodes de plus en plus longues. Je suis certain que vous allez commencer à voir des problèmes auxquels vous n’auriez jamais pensé, par exemple quoi faire avec les aliments qui se trouvaient dans votre réfrigérateur/congélateur, ou comment garder votre maison au chaud/au froid - ou même cuisiner sans électricité. Vous ne saurez pas vraiment tant que vous n'aurez pas essayé.

Contacter la famille en cas d'urgence lorsque les cellulaires sont en panne - Il est courant que personne ne puisse utiliser son téléphone portable pour appeler qui que ce soit après qu'un ouragan ait frappé. Que feriez-vous si cela se produisait chez vous ? Même si nous sommes relativement épargnés par ce genre de catastrophe dans l'hexagone, les grosses inondations sont très fréquentes et pourraient abattre les tours de téléphonie mobile de la même manière. Décidez d'un déclencheur (par exemple une catastrophe mentionnée dans les nouvelles), puis fixez le temps nécessaire pour joindre chaque personne de votre groupe sans utiliser de téléphone cellulaire ni d'Internet. Vous pouvez penser à de nombreux scénarios qui nécessiteront une planification différente. Par exemple, que faire si certains parmi vous (ou une partie d'entre vous) sont en dehors de la ville, si une personne a une urgence que les autres doivent connaître, ou si toute la zone est touchée ? Réfléchissez-y, proposez un plan pour mettre en pratique ce scénario, et essayez-le.

Essayer d'utiliser et de tester tous les équipements tant que cela est possible - Si vous disposez d'un bon stock de nourriture d'urgence stockée dans votre cave, assurez-vous de l'utiliser. Les préparations peuvent durer des années, mais pas pour toujours. La rotation des stocks vous permettra de vérifier ceux-ci régulièrement, et de déceler des choses éventuellement inutiles ou moins bonnes. Ce serait bien si vous saviez comment préparer quelques plats décents avec ce que vous avez, quels assaisonnements ou autres aliments vous devez acheter à l'avance, et comment les cuire. Veillez également à utiliser tout le matériel que vous avez rangé dans votre sac d’urgence ou chez vous afin de savoir comment tout fonction et vous assurer qu'il le fait bien. Ce serait le comble pour un survivaliste que de se retrouver au cœur d'une catastrophe et de découvrir qu'il ne sait pas comment joindre quelqu'un sur son talkie-walkie ou se servir d'un Firesteel pour allumer un feu !

Évacuation forcée ou volontaire - S'il vous arrivait quelque chose qui vous obligeait à quitter votre domicile (incendie, inondation, loi martiale, tempête imminente, etc.), seriez-vous prêt ? Et si vous aviez 5 jours pour partir ? Et si ce n'était que 5 heures, 5 minutes ou 5 secondes ? Avez-vous tous vos équipements essentiels (ainsi que les personnes) prêts à le faire ? Pratiquez des exercices d'urgence pour savoir si vous l'êtes en demandant à une personne de la famille de déclarer au hasard qu'une urgence vient de se produire. Demandez alors à chacun d'expliquer en détails ce qu'il sait des procédures établies telles qu'il les connait à ce moment-là, et voyez combien de temps met tout le monde pour évacuer vers un endroit X. Cet endroit pourrait être à un kilomètre sur la route, la maison d'un membre de la famille, ou autre chose. Cette planification est intimement liée à votre plan d'urgence.

Pratiquer la survie en pleine nature - Le camping est à peu près la meilleure façon de faire dans la plupart des cas. Assurez-vous simplement que si vous utilisez le camping comme moyen d’enseigner la survie à votre famille ou à votre groupe, n’oubliez pas de le rendre agréable et enrichissant. Donnez des missions à chaque personne pour qu’elle enseigne un aspect de la survie (je suggérerais de travailler avec elle avant sa présentation, non seulement pour qu'elle démontre des choses correctes, mais aussi pour qu'elle ne se sente pas idiote si elle n'est pas bien préparée). Ne comptez pas uniquement sur les membres expérimentés. Dans la mesure du possible, essayez de faire en sorte que les membres plus jeunes ou moins expérimentés soient obligés de résoudre des problèmes sans que les personnes qui les ont en charge ne leur donnent d'instructions. S'ils se retrouvent à devoir faire face à un problème par eux-mêmes (de nombreuses personnes sont séparées des membres de leur famille lors de catastrophes naturelles), il faut qu'ils aient une compréhension de base des gestes à accomplir ou des décisions à prendre sans que quelqu'un d'autre ne leur dise.

Regarder les choses de l'extérieur - Le travail des agents de contre-espionnage des armées consiste principalement à protéger les forces alliées de ce que l'ennemi peut voir ou faire. Leur jeu favori est de tenter d'infiltrer ou d'observer une organisation ou une installation, et de recueillir des renseignements auprès du personnel ou de l'équipement pour vérifier la qualité de leurs procédures OPSEC. Examinez comment d'autres personnes pourraient influer sur vos projets si elles le voulaient, et demandez à quelqu'un de faire semblant d'être un de ces "espions" durant votre exercice (c'est encore mieux si vous prenez une personne inconnue des membres de votre groupe), puis discutez tous ensemble de ce que chacun a observé et de ce que vous pourriez améliorer.

Complications à la mi-exercice - Une fois que vous pensez que votre groupe se sort assez bien de l'entraînement, intégrez quelques complications et voyez comment tout le monde y fait face. Par exemple :

- Si vous constatez qu'une personne porte la majeure partie des équipements, déclarez qu'elle s'est maintenant cassé la jambe. Les membres du groupe vont-ils pouvoir s'occuper de la jambe ET des équipements ?
- Si une personne a pris la décision de faire quelque chose qui pourrait être un problème, par exemple suivre un raccourci pendant que le reste du groupe continue reste sur la bonne voie, déclarez que les moyens de communication sont en panne et que vous avez crevé un pneu. Avez-vous les outils et l'expérience nécessaires pour changer la roue ? Que feront les membres de l'autre groupe une fois qu'ils arriveront et se retrouveront seuls ?
- Si vous pratiquez un itinéraire d'évacuation pour vous rendre chez un membre de votre famille ou juste en dehors de la ville (désigner une destination), déclarez qu'un arbre est tombé sur la route ou que la circulation est bloquée sur les 50 prochains kilomètres (ou la route est inondée), et que vous ne pouvez pas utiliser la route principale. Comment allez-vous parvenir à votre destination à présent ?
- Si vous campez, déclarez que vos méthodes principale et secondaire de démarrage d’un feu sont manquantes (volées, perdues, peu importe). Comment les gens de votre groupe vont-ils allumer un feu, en supposant qu'il n'y ait personne aux alentours pour les aider ?

Dans tous les cas et quel que soit la nature de votre groupe (famille, amis, ou autres), pensez à rendre la formation non seulement utile mais aussi agréable. Si vous voulez que vos gens suivent sans rechigner, vous devez alors vous assurez qu’ils aiment faire vos exercices. Attribuez à chaque personne une mission principale dans chacun de vos plans, tout en aménageant des "sauvegardes". Demandez-leur d’enseigner quelque chose au groupe à propos de leur travail (premiers soins, radio, filtration de l’eau, allumage d’un feu, etc.).

Faire participer les gens est une chose particulièrement efficace pour obtenir leur adhésion. Assurez-vous que les personnes (y compris vous) ne sont pas stressées durant vos exercices d’entraînement. Rappelez-vous enfin que ceci est quelque chose que vous devriez faire continuellement, et pas seulement sur le court terme...