Chronique d'une mort annoncée

Imaginons...

"Il y a quelques minutes à peine, une explosion a secoué la centrale nucléaire de... (choisissez la vôtre). Ceux qui se trouvaient à proximité ont durement ressenti les secousses. Les responsables de la centrale disent que cette explosion n'est pas due à un dysfonctionnement, mais pensent plutôt qu'un ou plusieurs dispositifs ont explosé dans l'intention spécifique de provoquer une catastrophe nucléaire..."

Dans le doux confort de son appartement luxueux, Gérard vient d'entendre la nouvelle qui s'est propagée sur les ondes. Le présentateur enchaîne...



"Si vous vivez dans la zone de la centrale ou à proximité, vous devez partir immédiatement. Les radiations et les retombées vont se répandre. Les résidents sont invités à évacuer d'urgence pour leur sécurité."

Ses yeux s'écarquillent comme des billes. Gérard vit tout près. Il vient de passer une nuit chaude et confortable, et quelques minutes avant, son plus gros souci était de décider quelle chaîne regarder sur le câble. Mais à présent, sa vie est en danger.

Tandis qu'il saisit ses clés et se dirige vers la porte, Gérard décide de descendre vers le sud pour rejoindre la maison de ses cousins. Avant son départ, il ne peut s'empêcher de regarder les nouvelles une dernière fois.

"D'autres rapports font état d'explosions dans le département et ailleurs. Les zones métropolitaines de tout le pays connaissent des attaques allant de simples explosions de bombes artisanales, à des destructions plus planifiées d'infrastructures telles que des usines de traitement de l'eau et des barrages..."

Ce n'était dont pas un incident isolé. Gérard doit penser vite. Les radiations le menacent, et il n'est pas prêt à mourir.

Entre-temps, il a tiré un vieux sac de randonnée du placard, puis, dans la précipitation, l'a bourré de vêtements et d'autres choses qui lui tombaient sous la main. Il ne possède pas d'arme à feu et n'a pas non plus de nourriture toute prête à y mettre. De toute façon, il n'a pas le temps d'en chercher. Des vêtements, une lampe de poche et des articles de toilette suffiront ; IL DOIT ABSOLUMENT S'EN ALLER.

La Température

La saison des fêtes vient de s'achever et un vent froid d'hiver le saisit à la porte. Il court jusqu'à sa voiture et jette le sac à l'intérieur. Le moteur rugit, et le voilà parti en direction de l'autoroute. Il s'est dit que ce serait le moyen le plus rapide pour se mettre à l'abri.

Quelques kilomètres avant d'atteindre la voie rapide, il s'est rendu compte qu'il avait fait une énorme erreur. Il a dû freiner in extremis pour éviter de cogner la file de voitures arrêtées devant lui, et les autres qui le suivent font de même. A présent, il ne peut plus avancer, ni reculer. Il réalise alors qu'il est pris au piège.

C'est à ce moment-là que le premier coup de feu se fait entendre.

Tandis qu'il regarde à travers le pare-brise, Gérard voit le flash d'une autre arme, puis d'autres encore accompagnés de leurs détonations. Pourtant, il n'arrive même pas à discerner les protagonistes ! Terrifié comme tout un chacun - car tout le monde sait bien que les armes sont terriblement dangereuses et qu'elles tuent des gens - il s'est jeté hors de sa voiture après avoir saisi son sac. Là, il s'est retrouvé dans le froid.

Gérard a couru sans réfléchir vers les bois qui longeaient la route, et ses baskets sont remplies d'eau gelée avant même qu'il ne les atteigne. Tout de suite après s'être caché sous les arbres, il a fouillé dans son sac pour en tirer des vêtements supplémentaires. Mais avec le vent rude et les basses températures, rien de ce que Gérard n'a emporté suffira pour arrêter le froid.

Solutions pour le sac d'évacuation (en fonction des saisons) : couvertures d'urgence, vêtements d'hiver isolés, poncho, coupe-vent.

Le Feu

Il n'aura pas fallu attendre bien longtemps pour que Gérard se retrouvent avec les mains douloureuses et glacées, mais il a décidé de s'éloigner le plus possible de la centrale, même s'il fallait le faire à pied. Le chapeau et les gants qu'il a tiré de son sac ne sont pas prévus pour de telles conditions, mais c'est toujours mieux que rien.

En fin de journée, il se retrouve épuisé près d'un rocher escarpé. Il a pensé que ce serait un bon endroit pour se reposer un instant et se réchauffer. Confiant, il se dit qu'il pourrait utiliser le briquet dans son sac pour allumer un feu.

Avec sa lampe de poche, il regarde autour, à travers les volutes de son propre souffle glacé, cherchant ce qu'il pourrait utiliser à cet effet. Mais la forêt entière est humide.

Finalement, Gérard a déniché un peu d'amadou à la base d'un pin, mais n'a pas été capable d'obtenir plus que quelques brindilles brûlant à la fois. En fait, il n'y avait tout simplement pas de petit bois sec aux alentours pour faire partir un feu.

Solutions : tablettes d'alcool solidifié, tablettes allume feu, peluche/charpie sèche en sac étanche, scie pliable...

L'Abri

Après que le feu se soit avéré être un échec, il était temps pour lui de trouver un abri. Il lui fallait se protéger du vent, qui devenait vraiment violent. Gérard n'avait aucun moyen de savoir s'il était suffisamment loin de la catastrophe pour être à l'abri des radiations. Pour l'instant, il se sentait encore bien, à part le fait qu'il était en train de geler.

Gérard a suivi la paroi rocheuse escarpée, jusqu'à finalement repérer une petite entaille dans la falaise. Promenant sa lampe à l'intérieur, il vit qu'elle était vide. En y pénétrant plus profondément, il remarqua que le vent n'y soufflait pas, mais aussi qu'elle était très froide.

Solutions : compétences de Bushcraft pour la construction d'abris, pelle, bâche, tente individuelle (le top...)...

La Nourriture

Après avoir marché durant toute la journée sans s'arrêter, et sans même avoir pu se réchauffer, voilà que la faim lui tenaillait à présent l'estomac. Gérard jura à voix haute quand il se rappela qu'il n'avait rien emporté. Il était gelé, affamé, et n'avait aucun moyen de faire face à l'un ou l'autre de ces problèmes. En plus, il était probablement perdu, mais ce n'était pas ce qui le préoccupait le plus à cet instant.

De l'intérieur de sa petite caverne, il aperçut des baies rouge vif sur un buisson. Il n'était pas sûr du type de de baies dont il s'agissait, mais elles avaient l'air sympas, et il n'avait pas mangé depuis le déjeuner.

"De si petites baies ne peuvent pas faire grand mal !" Se dit-il.

Il en récolta une pleine poignée et les mit en bouche, s'attendant à un goût sucré, un peu comme une part de tarte. Mais au lieu de cela, elles étaient incroyablement amères. Gérard cracha autant qu'il a pu, sans pouvoir se défaire de l'amertume au fond de sa gorge.

Solutions : Barres hypercaloriques, collations lyophilisées, rations de survie...

L'Eau

Les baies furent un échec de plus. A présent, Gérard avait soif, en plus de cet arrière-goût terrible dans sa bouche. Il a rassemblé un peu de neige dans une bouteille en plastique ; il n'y en avait pas beaucoup sur le sol, et l'a donc prise dans de petits creux sur la paroi. Une fois que Gérard eut récolté une bouteille à moitié pleine, il retourna vers la grotte pour se réchauffer du mieux qu'il pouvait et faire fondre la neige.

Au bout d'une demi-heure environ, la neige avait fondu, mais l'eau était encore très froide. Gérard était engourdi. Il amena la bouteille devant sa lampe de poche ; la neige blanche et claire s'était transformée en un liquide ragoutant et trouble qu'il pouvait à peine s'imaginer boire.

Solutions : Filtre à eau, pastilles désinfectantes, eau en bouteille...

L'orientation

Au bout d'une autre heure, Gérard réalisa qu'il ne tremblait plus. Il était fatigué, et quelque chose à propos de la situation le tourmentait. Le mot HYPOTHERMIE ne cessait de trotter dans sa tête, et il comprit qu'il valait mieux bouger son corps pour générer de la chaleur ; la grotte n'était pas suffisamment chaude.

Un autre problème était que Gérard n'avait aucune idée de l'endroit où il se trouvait, ni de la direction à prendre. Lorsque les premiers coups de feu avaient éclaté, il s'était contenté de s'éjecter de la voiture pour courir vers la forêt, sans avoir le temps de réfléchir un instant aux conséquences éventuelles.

Il leva les yeux vers les étoiles et la lune, puis il regarda sa montre. Il n'avait aucune idée de comment se repérer. Même s'il pouvait discerner le Nord, il ne savait pas quel chemin prendre.

Solutions : Cartes d'état-major du secteur, boussole, compétences d'orientation...

Les Communications

Le moment était venu de prendre des mesures drastiques. Gérard avait des problèmes, et il en était bien conscient. Il a donc commencé à se déplacer à un rythme plus rapide, mais ses extrémités ne se réchauffaient pas pour autant. En fait, il pouvait à peine sentir ses pieds et ses mains. Même s'il avait trouvé de l'amadou sec et du bois d'allumage, ses doigts étaient si engourdis qu'il n'aurait même pas pu manipuler le briquet.

Le portable était mort. De toute façon, il avait déjà vérifié plus tôt ; plus de signal. Il ne pouvait même pas appeler à l'aide, ni même se tenir au courant de l'évolution de la situation. C'est à ce moment que Gérard commença véritablement à entrevoir la mort, ainsi que les erreurs qui l'avaient conduit jusqu'à ce point.

Solutions : radio à dynamo AM/FM, émetteur portable, sifflet de détresse, fusée éclairante...

Les premiers soins

Soudain, Gérard sentit une douleur fulgurante dans son estomac, comme si on y avait enfoncé un poignard. Il comprit immédiatement qu'il s'agissaient des baies. D'un coup il devint brûlant, et sa tête se mit à tourner. Finalement, il s'agenouilla et vomit sur le sol.

En s'effondrant à genoux, Gérard avait posé sa main sur un rocher pointu, qui l'avait entaillé profondément. A cet instant, il se demanda si les choses pourraient encore être pire. Puis il réalisa qu'il n'avait pas de médicaments pour son estomac, pas plus que de pansements pour sa main. Il savait désormais que non seulement les choses pouvaient empirer, mais qu'en plus, elles le feraient certainement.

Solutions : trousse de premiers soins, trousse de traumatologie, onguent antibiotique, médicaments...

La Défense personnelle

Chaque pas que faisait Gérard était celui d'un fantôme, et son battement de cœur, la seule chose qui l'assurait que quelque chose en lui vivait encore. Ses yeux étaient exorbités. Chaque fois qu'il sortait d'un fourré ou atteignait le sommet d'une colline, il s'attendait à trouver une route ou un hameau. Mais au lieu de cela, il n'y avait rien d'autre que l'étendue froide et impitoyable de la forêt.

Au bout d'interminables heures, il aperçut une lumière clignotante dans le lointain. C'ÉTAIT UN FEU ! Il aurait juré sentir la chaleur. Il courut vers elle aussi vite qu'il pouvait, manquant à chaque pas de s'affaler sur le sol.

A présent il y était presque ; le feu était juste au-delà des arbres...

C'est alors que Gérard vit les hommes ; quatre en tout. Il ne savait pas s'ils avaient fui le chaos comme lui auparavant, mais ils avaient l'air beaucoup plus au chaud et en meilleure forme.

"Hé mec, comment ça va - présentement ?" Gloussa l'un d'entre eux.

Immédiatement, Gérard comprit qu'il aurait des ennuis. Quelque chose dans le ton de la voix et la façon dont l'homme le regardait était éteint. Gérard recula lentement.

"Qu'est-ce qu'il y a dans le sac à dos ?" Renchérit un autre.

Les quatre hommes se levèrent. Ce n'étaient pas des amis ; ils voulaient juste prendre ce qu'il y avait.

Gérard se sentit instantanément nauséeux et son cœur se mit à battre la chamade. Sauf que cette fois, ce n'était pas à cause des baies. "Je n'ai rien de précieux !" S'écria-t-il. Mais à en juger par leurs visages, les autres ne l'avaient pas cru.

L'un des hommes ouvrit un grand couteau pliant et commença à s'approcher de lui...

Gérard avait pensé toute la journée que le froid finirait par lui ôter la vie, mais à la place, ce serait une lame glacée.

Solutions : arme à feu, matraque télescopique, machette, couteau de poche, poignard, hachette, tomahawk...

Conclusion

Bien sûr, tout cela n'est qu'une histoire, et certains pourront penser que la trame est un peu grosse. Pourtant, elle décrit de manière simple la réalité d'une évacuation faite à la hâte, et par là même, quelques-unes des choses indispensables que devrait contenir un sac.

Si le chaos devenait le quotidien de nos compatriotes, combien de situations vécues seraient-elles semblables à celle-ci ?

Si vous deviez évacuer en un instant, seriez-vous comme Gérard à finir transit, affamé, malade, et mort... ou tel un survivaliste préparé avec un plan d'évacuation, des équipements cohérents dans un sac, et des compétences pour survivre ?